Sur les traces de Fitzcarraldo

Les gens heureux n’ont pas de mémoire », dit-on, mais nous n’aurions jamais imaginé que les habitants de cette région du nord de la Bolivie, qui n’ont par ailleurs jamais été heureux, puissent oublier aussi rapidement la grande découverte de Fitzcarraldo, cet isthme qui aurait pu transformer leur existence. En l’espace de quatre-vingts ans, cette voie commode, efficace et bon marché avait été rayée de leur mémoire. Quelques vieux se souvenaient somme toute qu’il existait un Varadero (on appelle ainsi un isthme dans ces contrées) quelque part dans les Andes, mais personne ne l’avait jamais franchi. Il avait été décidé que notre groupe se scinderait en deux au départ de Caracas : Ricardo et Constantin partiraient avec tout le matériel le 1er août, Paul et Angel suivraient quelques jours plus tard. Nous devions nous retrouver à Pucallpa, au Pérou, où il fallait faire les derniers achats, trouver une embarcation pour naviguer sur l’Ucayali et attendre nos autres compagnons.